14/12/2009
« Refuser à un client de lui vendre une tarte aux fraises à Noël »
Le traiteur organisateur de réception Alain Marcotullio, Président de Marcotullio Traiteur (54), a coiffé la casquette de Monsieur Développement durable au sein de l’association des Traiteurs de France (36 membres).
Restauration21- Pourquoi avez-vous pris en charge ce dossier du Développement durable au sein des Traiteurs de France ? Est-ce par conviction personnelle ?
Alain Marcotullio – Tout d’abord par conviction personnelle, parce que j’applique à moi-même et au sein de mon entreprise, les règles de bonne conduite en termes de Développement durable depuis plusieurs années, conscient que c’est un problème et que chacun d’entre nous à son niveau peut y remédier. Etant vice-président en charge des régions au sein de TDF [ndlr : Traiteurs de France] quand on m’a proposé cette tache, j’ai tout de suite accepté en cumulant avec mes autres travaux. Aujourd’hui c’est un rôle à part entière et à plein temps au sein du réseau que de s’occuper du Développement durable.
Pour aller un peu plus loin que les engagements décidés lors de votre dernière convention nationale[1], en quoi l’activité traiteur est-elle impactée par le Développement durable ? Et surtout en quoi pourrait-elle être impactée par la non-prise en compte d’une démarche Développement durable ?
A.M. : Au cours de l’année 2009, nous avons réalisé un audit auprès de chacun des membres de TDF sur des points essentiels tels que les produits, la nature de l’offre globale, la gestion des déchets, les ressources humaines et le recrutement. Il s’agissait de savoir ce qui avait été fait, d’évaluer notre aptitude à nous adapter à une démarche Développement durable et surtout notre envie de nous impliquer. Ces audits nous ont permis de placer un curseur pour nous situer. Aujourd’hui, je peux vous dire que la majorité des traiteurs sont en place pour faire évoluer ce sujet dans leurs entreprises. L’activité traiteur est forcement impactée par le Développement durable car la demande de la clientèle commence à évoluer vers des prestations plus éco conçues. Il faut simplement que la filière s’organise, tant du côté des fournisseurs que des prestataires afin que tous soyons en phase.
Pourquoi ne pas attendre et voir ce qui se passe ?
A.M. : Ce n’est pas un effet de mode. C’est un véritable changement de nos comportements que je ne peux qu’encourager. Oui c’est compliqué de refuser à un client de lui vendre une tarte aux fraises à Noël ! Mais c’est par l’éducation de nous même et de nos clients qu’il faut commencer.
Les clients sont-ils déjà demandeurs ou les TDF sont-ils prescripteurs ?
A.M. : Les clients des agences, des grandes entreprises, des administrations sont demandeurs de prestations éco conçues, et TDF est prescripteur en effet depuis une bonne année. Ce sont les clients particuliers qu’il faut aujourd’hui convaincre.
Comment les clients reçoivent-ils ces nouveaux arguments commerciaux ?
A.M. : Ils sont sensibles à nos efforts. Ils comprennent lorsque nous leur demandons de mettre à disposition, sur les réceptions, des bennes à verre, des bennes à tri sélectif. De même, ils l comprennent plus facilement l’argument de saisonnalité ; même si la couleur de leur entreprise est « rouge fraise » pour reprendre mon exemple plus haut. Ce que nous n’arrivons pas encore à maîtriser, ce sont les coûts. En effet le Développement durable coûte cher. L’agriculture bio est plus chère, les jus de fruits aussi, le commerce équitable également. Et cela il faut le vendre. Mais je pense que tout cela va se lisser et que nous devrions arriver à un prix moyen pondéré qui se rapproche de ce qu’on fait actuellement. .
Vos adhérents sont-ils tous concernés ? Comment leur faire prendre conscience de leur rôle modeste face à des enjeux d’ordre mondial ? La tache n’est-elle pas immense ?
A.M. : Oui je le pense vraiment. En tout cas, le message qu’on leur a fait passer depuis un an a porté ses fruits si l’on se fie au résultat de l’audit. Je suis même surpris de ce qui est fait aujourd’hui chez certains Traiteurs de France, jusqu’au vélo mis en place par certains pour que les salariés viennent travailler. Le message de l’association qui est passé à chaque adhérent est retransmis à ses collaborateurs, par la nomination, par exemple, d’un responsable Développement durable dans les entreprises. Le chef d’entreprise doit être le leader de la démarche et qui doit faire prendre conscience à chaque collaborateur l’importance de l’engagement.
Est-ce que l’application des engagements pris par les TDF (couverts recyclables, circuits courts…) génère un surcoût pour les clients ?
A.M. : En effet cela représente un surcoût aujourd’hui. Mais c’est aussi notre travail à l’avenir. Faire en sorte que ce qui est marginal maintenant et donc plus cher fasse partie de notre quotidien. Le circuit court ne coûte pas plus cher c’est simplement les difficultés d’approvisionnement qui nous posent problèmes. A nous d’aider la filière en sollicitant les producteurs et ainsi la production bio et l’agriculture locale se développeront. Je préfère utiliser un poulet de ferme qui est élevé en plein air à quelques kilomètres de mon entreprise que de faire venir des poulets bio d’Allemagne …
Qu’est ce qu’une prestation éco-conçue ? Comment est-elle élaborée ? Tous les TDF en proposent-ils ? La prestation éco-conçue est elle une offre de plus ? L’offre unique systématiquement vendue aux clients ?
A.M. : Une prestation éco conçue l’est du début à la fin. Et c’est tout le travail Que Nous Mettons en œuvre avec l’Anae, FSCEF, CSPE, FFMEE, France Congrès et le Sympase avec Eco Evénement qui est une association des partenaires de l’événement pour justement être le plus proche possible de la vérité en terme de DD de la moquette aux petits fours … C’est donc un travail collégial que nous nous proposons de mettre en place avec tous les acteurs de la filière pour être force de proposition et se trouver leaders individuels et donc leaders tout ensemble pour faire de nos prestations à l’avenir, de véritables réceptions éco conçues. L’offre pour l’instant n’est que proposition. Elle ne peut être unique car elle doit s’adapter. Il y a encore beaucoup de travail à faire mais nous sommes sur la voie.
De quelles façons les TDF peuvent-ils être acteurs ?
A.M. : Ils doivent être force de proposition. Le travail réalisé au bureau des TDF tout au long de l’année et celui que nous faisons en partenariat avec les associations citées plus haut nous donne des arguments. Nos avancées sont relayées auprès de chaque adhérent et chacun d’eux organise en interne des tables rondes. Cela leur permet à eux mais aussi à leurs commerciaux d’être acteurs auprès de leur client. Quand aux réunions, je pense en particulier aux Chambres de commerce, aux mairies qui sont preneuses de nos conseils et même en formation auprès de certaines classes d’écoles hôtelières.
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