01/12/2025
Sobriété hydrique : les CHR réduisent le débit
Les canicules estivales à répétition et le réchauffement climatique imposent à tous les acteurs des CHR d’optimiser leur consommation d’eau tout en garantissant un service de qualité.
Cet article a été publié dans le Magazine #15 de Restauration21.
Rendez-vous est pris au début de l’été au B&B Home à Saint-Ouen (93) avec Arthur Dumoulin, l’un des trois cofondateurs de Luniwave. Dans cet hôtel récemment ouvert, la start-up, lancée il y a 2 ans, a installé dans chacune des chambres une « Lunishower », une douche dotée d’un dispositif destiné à inciter le client à réduire volontairement sa consommation en eau. Dès le hall de l’hôtel, la curiosité du client est piquée: des flyers lui promettent un défi au moment de la douche. « Plutôt que de punir la consommation, on récompense l’économie. On ne peut pas imposer aux clients de réduire leur consommation en eau mais on peut les y inciter. Moins d’eau chaude consommée, c’est une empreinte carbone réduite et des économies sur les coûts de fonctionnement pour l’établissement » explique le jeune entrepreneur de 25 ans. Il estime que sa solution permet de baisser de 35 à 55 % la consommation moyenne d’eau.
Incitations-récompenses
Sur un écran fixé dans la salle de bains, le client sélectionne un objectif de consommation parmi trois: 15, 30 et 35 litres, qu’il suit en direct, sous sa douche, grâce à des voyants lumineux situés sous le robinet. À la fin, son score s’affiche à l’écran ainsi que le don qui sera fait à l’ONG Made Blue Fondation : sur la base d’un litre économisé un litre d’eau potable offert. Le dispositif « incitations-récompenses » ne s’arrête pas au seuil de la salle de bains. L’hôtelier peut inclure la « Lunishower » dans un programme plus large appelé « GreenMiles » pour déclencher auprès des clients d’autres gestes d’économies: renoncer au ménage quotidien dans la chambre, optimiser l’utilisation des serviettes de toilette… À son arrivée à l’hôtel, le client scanne un QR code qui lui donne accès à un tutoriel via une web application lui expliquant comment accumuler des « GreenMiles » en adoptant des gestes responsables. « Avec le dispositif global, nous sommes passés d’une consommation d’eau moyenne par chambre de 150 litres à 36 litres » souligne Vincent Quandalle, directeur général de B&B Home.
De la donnée sur les volumes
« L’eau, c’est une préoccupation récente » pose d’emblée Carine Legoux, directrice RSE de Bertrand Hospitality. De fait, si dans la liste des sujets RSE, la maîtrise de sa consommation ne s’est pas aussi rapidement imposée que celle de l’énergie dont les coûts ont flambé, la démarche s’appuie, elle aussi, sur un point central: « obtenir de la donnée sur les volumes de consommation pour pouvoir la suivre année par année ». Avec comme horizon l’objectif national de réduction de 10 % des prélèvements d’eau d’ici 2030, via un plan de sobriété hydrique auquel ont souscrit les CHR en avril dernier dans la continuité du Plan Eau lancé en 2023 [lire encadré]. Pour obtenir ces données en temps réel, il s’avère nécessaire de s’adresser au gestionnaire local, ce qui peut se révéler compliqué étant donné le nombre d’acteurs en France. « Eau de Paris nous a ouvert son portail. Nous suivons notre consommation en temps réel et connaissons le ratio par couvert et par établissement. Plus besoin de recevoir la facture trimestrielle pour s’apercevoir qu’il y a une grosse fuite quelque part. Mais toutes les régies ne fonctionnent pas en open data ». Quel est le ratio satisfaisant? « Je considère que les établissements les plus performants sont à 20 litres par couvert. La préparation du repas compte très peu. La plonge, les toilettes et surtout les systèmes de refroidissement pèsent lourd. Par exemple, un système à eau perdue fait bondir la consommation à 65 litres par couvert », précise la directrice. La formation des équipes (fermer les robinets, remplir correctement le lave-vaisselle permet encore de faire 10 à 15 % d’économie.
RÉCUPÉRER LES EAUX GRISES POUR SATISFAIRE LES BESOINS
EN EAU NON SANITAIRE ET NON POTABLE
Avec une subvention pouvant monter à 25 K€ décrochée à la suite de l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) porté par Atout France pour la gestion des ressources en eau dans le tourisme, la coopérative Best Western Hotels France a pour objectif d’accompagner jusqu’à 40 établissements de son réseau (320 adhérents) vers une consommation raisonnée grâce à la réalisation de diagnostics et à la formation des équipes. Rachel Loison, directrice adjointe RSE et Marque employeur de l’enseigne, compte sur la mobilisation de ses hôteliers, tous indépendants. « Nous voulons, dans le cadre de l’appel à projet, cibler particulièrement les établissements ayant des piscines ou des spas, des équipements plébiscités par les clients mais aussi par les professionnels, ou encore les hôtels situés dans de vieux bâtiments. Plus nous aurons d’hôtels embarqués dans l’opération, plus l’aide financière sera importante » précise-t-elle. D’ici la fin de cette année, près de 75 % du réseau sera labellisé Clef Verte, dont la sobriété en eau est une des priorités. « Les audits permettent de récupérer de la data des compteurs. 175 sont actuellement en cours. Récupération des eaux de pluie, réutilisation des eaux grises… l’AMI va nous aider à nous ouvrir à des solutions innovantes ».
Étudier les comportements
Pour identifier les clés de l’engagement du personnel et des clients en faveur de la sobriété hydrique dans les établissements touristiques qu’elle labellise, la Clef Verte, également lauréate de l’AMI, va faire appel à un chercheur en psychologie comportementale qui interviendra auprès de 4 établissements labellisés volontaires. Un projet de recherche qui s’articulera avec l’ambitieuse analyse lancée sur 4 territoires pilotes auprès d’une dizaine de très bons élèves disposant de données fiables et vérifiées. « Des interviews seront menées pour savoir comment ils atteignent leurs résultats. L’idée étant de les prendre pour modèle et de diffuser leurs bonnes pratiques. Nous prendrons en compte leur offre de service, leur localisation, le niveau de gamme et le nombre de nuitées vendues. Parallèlement, un travail de fiabilisation globale des données sera mené » explique Nathalie Bel Baussant, directrice du pôle tourisme durable de Teragir & Responsable du programme Clef Verte. Elle rappelle que satisfaire aux exigences du label c’est possiblement économiser 50 litres par nuitée, l’eau étant l’une des 7 sections du référentiel.
La Clef Verte demande 18 actions sur la thématique de l’eau aux établissements, allant du mousseur à l’arrosage raisonné au goutte-à-goutte le matin et le soir, en passant par la recherche de fuite, la pose de compteurs et sous compteurs. « On explique que la qualité de la douche reste la même avec un mousseur régulant le débit de l’eau à 5,9 litres par minute. Le respect de la conformité à la réglementation sur l’eau et la non-pollution de l’environnement sont également pris en compte. S’il n’est pas relié au réseau collectif, on vérifie que l’établissement est bien en règle avec le SPANC(1) qui atteste de la conformité de son système de traitement des eaux usées ».
(1) Service Public d’Assainissement Non Collectif
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